Fidèle jusqu'à la rupture

Il y a quelque semaines est sorti le film à sketchs "Les Infidèles", avec notre nouvelle star nationale Jean Dujardin. Je suis allée le voir avec mon amie d'enfance Solenne, un dimanche après-midi, à l'UGC des Halles. J'étais persuadée d'en ressortir avec encore plus de ressentiment que d'habitude envers les hommes en général, et plus particulièrement ceux qui trompent leur femmes. Et le sujet de la fidélité dans le couple, abordé en long et en large dans les médias pour la promo du film, m'a plongée dans des questionnements liés à mon histoire personnelle.

Il faut savoir que c'est un sujet qui me tient à coeur, la fidélité. Jusqu'à l'âge de mes 20 ans, avoir une aventure avec un mec maqué ne me posait pas vraiment de problèmes. Je crois que j'estimais avoir le droit de faire ce que je voulais sans qu'on m'en empêche et sans penser au mal que je pourrais causer à l'autre, la légitime, la vraie copine. Mais un jour, j'ai réalisé que c'était immoral, dégradant pour moi comme pour la fille trompée, et que je ne voulais en aucun cas faire quelque chose que je ne voudrais pas qu'on me fasse. A partir de ce moment-là, quelque soit le degré d'attirance que j'éprouvais pour un homme, je tirais systématiquement un rideau sur lui si j'apprenais qu'il était déjà en couple. Et j'étais assez fière de m'être tenue à ce principe toutes ces années, tout en éprouvant toujours un certain mépris envers les filles pour qui déchirer un couple ne posait aucun problème.

Bon, n'allez pas croire que je sois blanche comme neige non plus. J'ai, moi aussi, fauté et trompé quelques uns des hommes avec qui je suis sortie. Mais j'ai à chaque fois rompu avec eux quelques jours après. L'infidélité a toujours été pour moi un moyen de sceller dans ma tête la fin d'une relation, avant d'en faire officiellement part à l'autre. Je ne peux pas m'imaginer rester en couple avec quelqu'un que je trompe allègrement de l'autre côté. Car si je trompe l'homme que j'aime, cela signifie que je ne l'aime plus, donc que je n'ai plus rien à faire avec lui.

(note : tout ce que j'écris dans mes articles correspond à ma vision actuelle des choses, et je suis consciente que je changerai probablement avec le temps et les expériences. Comme tout le monde…)

L'année dernière, j'ai trompé Julien, un stagiaire que j'avais rencontré à mon ancien boulot à Publicis et avec qui je sortais depuis 6 mois. C'était une relation déséquilibrée, moi m'accrochant à lui pour de fausses raisons, lui me mettant le plus de barrières possibles pour que je ne m'attache pas. Au bout de 6 mois de ce régime, j'avais réussi à construire une carapace sentimentale assez épaisse pour m'imaginer avec d'autres hommes que lui. Au même moment, j'ai rencontré Aurélien, l'homme parfait sur le papier, gentil, romantique, intéressant, tendre, attentif. Il m'a offert plus en quelques jours que Julien n'en avait fait depuis le début de notre histoire. Et lui au moins ne me mettait pas de barrières pour l'aimer ou pour se projeter dans un avenir ensemble. Alors, j'ai passé quelques soirées romantiques avec Aurélien, et j'ai commencé le travail de comparaison habituel entre deux options : je suis amoureuse de Julien, mais Aurélien est génial, je sais qu'il pourrait me faire vivre un vrai conte de fée, m'emmener au restau, au ciné, voir des expos, rencontrer ses amis, sa famille, alors que Julien ne me fait jamais rien faire, et préfère jouer à ses jeux vidéo toute la nuit plutôt que de venir dormir avec moi dans le lit. Avec lequel dois-je continuer? Lequel me rendrait plus heureuse? C'était comme aller à la Fnac un samedi aprem et comparer les fonctionnalités de deux appareils photos numériques avec d'en acheter un. Rien à voir avec l'amour, la passion ou les sentiments! Mais à cette époque, je ne pouvais pas faire mieux, car je n'arrivais pas à me détacher d'une passion sexuelle inutile avec Julien ni à éprouver assez de sentiments pour commencer une vraie relation avec Aurélien. Alors au final, et vu que j'avais trompé chacun d'eux avec l'autre, j'ai décidé de ne rien choisir : j'ai rompu avec Aurélien, puis quelques semaines plus tard j'ai rompu avec Julien. Sans regrets. Voilà comment j'ai soldé mes remords d'infidélité.

Petit "memo" au passage : n'oubliez pas que tout finit toujours par se savoir… Les textos de votre amant ou maîtresse qui s'affichent sur votre portable posé sur la table du salon pile au moment où vous êtes parti aux toilettes, les informations discordantes sur votre emploi du temps de la journée ("Mais comment tu as pu croiser Machine rue Montorgueil à 14h alors que tu étais en réunion à Suresnes toute la journée?"), le mauvais prénom qui vous échappe dans une conversation avec votre régulier(ère) et les questions qui suivent ("Mais c'est qui Claire? Si, je t'assure, tu viens de m'appeler Claire… Arrête de me mentir, je sais très bien que tu ne voulais pas dire “c'est clair”!").

La preuve en est : 9 mois après notre rupture, Julien et moi entretenions toujours un contact amical sur Skype ou sur le tchat de Facebook, et il me pose un jour la question :

"Tu ne m'as jamais trompé?". 

Connaissant ses théories sur l'infidélité (il l'avait en horreur, et m'avait très souvent soumise à des séances de questions/suspicion sur ma capacité à rester fidèle toute ma vie), je lui réponds avec un air un peu excédé :

"Non Julien, t'es chiant avec ce sujet!". 

Et je vois un petit sourire de satisfaction sur son visage, dans l'image que me renvoie sa webcam : 

"Ah bon, tu es sure? Parce qu'on m'a dit que…". 

Pensant qu'il teste une nouvelle ruse pour me faire avouer des péchés qu'il s'imagine que j'ai commis, je réponds :

"On ne t'a rien dit du tout Julien, tout simplement parce qu'il n'y a rien à dire"

"Je ne sais pas. On m'a parlé d'un certain… Aurélien…"

Mon visage se fige, ma bouche s'ouvre de surprise. Il sait. Comment, il ne me le dira jamais. Tout ce qui importe, c'est qu'il sait, il a su. Même neuf mois plus tard, il a réussi à savoir. Je trouve ça dingue! Maintenant qu'il a lâché le morceau, il ne se gêne plus pour me critiquer :

"Tu te rends compte, si on était restés ensemble, que j'avais sacrifié mes projets de partir aux Etats-Unis pour rester avec toi à Paris, par amour pour toi, et que j'apprenais aujourd'hui que tu m'avais trompé?! Tu te rends compte dans quel état ça me mettrait?"

Sur ce, je réponds simplement : "Oui, je me rends compte. Mais est-ce qu'on est encore ensemble aujourd'hui Julien? Non. Et pourquoi? Parce que j'ai rompu. Comme quoi, je t'ai peut-être trompé mais je n'ai pas eu l'indécence de rester avec toi plus longtemps après cette faute".

Voilà qui résume ce que je pense de l'infidélité : c'est humain d'en venir à tromper la personne avec qui l'on est ; par contre, c'est inhumain de rester avec elle après cela.

Après ma double rupture avec Julien et Aurélien, j'avais acquis assez de confiance en moi pour pouvoir supporter une période de célibat bien méritée, et me reposer de tous ces égarements par lesquels j'étais passé. J'avais la ferme intention de ne plus perdre de temps avec des relations sans issue, qui ne me correspondaient pas, et qui me faisaient trop souffrir. Je ne savais pas que j'allais entrer, quelques jours plus tard, dans l'histoire la plus douloureuse que j'ai vécu jusqu'à aujourd'hui. C'était il y a un an…